1768 : la bataille de Patrimonio racontée par un descendant de Luiggi Calvelli

15 août 2016 à 17:11

Rappel de la situation en Corse en 1768.

Luiggi CALVELLI (voir annexe 1) ayant fait allégeance à PASCAL PAOLI en décembre 1755, le gouverneur Génois, DORIA menace de confisquer ses biens dès janvier 1756 (sans résultat). En effet depuis ce moment-là, Pascal PAOLI avait la possibilité d’interdire aux Génois la liaison entre Saint-Florent et Bastia par la terre, et la liaison entre Saint-Florent et les villages du Cap qui passaient par Patrimonio.

L’armée Française débarque en juin 1768 à Bastia, et à Saint-Florent. Dès le mois de Juillet 1768 les forces Françaises étaient de 6 bataillons, 2 à Bastia et 4 à Saint-Florent. A Saint-Florent le Régiment d’EPTING et le ROYAL ROUSSILLON (voir annexe 2) (à St Florent les troupes Françaises étaient stationnées sur la plage entre la citadelle de St Florent et Olzu). Les Français avaient de l’artillerie, deux canons de 4 (tirant des boulets de 2 Kg avec une portée entre 200 et 300 m) et un obusier (tirant des boulets de 15 cm de diamètre et de 10 Kg)

Les milices de PAOLI commandé par BARBAGGI (voir annexe N°3) empêchaient les Génois de sortir de Saint-Florent en tenant les passages du côté du Poggio (jusqu’à la cathédrale), coté Patrimonio en tenant les Strette.

La position de Patrimonio était donc stratégique et…dangereuse. En effet à quelques Kms de Saint-Florent qui a toujours été tenu par les Génois, et plus tard par les Français et sur la route de Bastia citadelle et port Génois, tenir Patrimonio c’était empêcher la liaison entre les deux garnisons. Or à partir de Décembre 1755 Luiggi CALVELLI ayant choisi le parti de PAOLI, la liaison entre les deux ports par la terre devenait difficile voire impossible pour les Génois.

En 1768 les Français avaient débarqué à Saint-Florent et Bastia, MARBEUF commandant le corps expéditionnaire Français avait envoyé un ultimatum à PAOLI (qui se terminait le 4 Aout) lui demandant de se soumettre.

MARBEUF sachant que PAOLI regroupait ses milices au Sud du Golo ne devait pas attendre la fin de l’ultimatum et dans la nuit du 29 au 30 Juillet 1768 les Français venant de Saint-Florent sous les ordres de GRANDMAISON attaquaient Patrimonio.

Pommereul un officier Français avoue en toute bonne foi : « La trêve avec les Corses ne devait finir que le 4 août, comme ils étaient en mesure de se défendre, on ne crut pas en la rompant avant terme violer la loi des traités ».

Les ordres de CHOISEUL donnés à MARBEUF étaient clairs il devait « mettre au pas les Corses ».

Cette attaque a bien été préméditée, puisque c’est bien le même jour que MARBEUF de Bastia et GRANDMAISON de Saint-Florent ont attaqué.

La première attaque a donc eu lieu dans la nuit du 29 au 30 Juillet 1768 dans les gorges de Patrimonio au lieu-dit STRETTE . Un détachement commandé par l’officier BELASPECT sera repoussé par les milices Corses (environ 200 hommes) commandé par BARBAGGI ; BELASPECT y a laissé la vie, il y aura ce jour-là 5 morts du côté Français, dont le soldat Erard qui sera massacré et le soldat Rebertin qui a été brûlé vif (voir le mémorial du régiment d’Eptingue).

Dans la journée du 31 Juillet 1200 hommes, avec de l’artillerie, sortent de Saint-Florent sous les ordres de GRANDMAISON.

GRANDMAISON au centre avec 600 hommes, M de CONSTANT à droite avec 300 hommes et 300 hommes à l’aile gauche commandés par le Marquis de VILLENEUVE TRANS. BARBAGGI qui commandait les milices Corses du Nebbiu (voir annexe 2) ne pourra pas résister longtemps dans les STRETTE et préférera se réfugier dans la maison CALVELLI, dont le propriétaire était Luiggi CALVELLI.

La maison CALVELLI sera donc attaquée le 1er Août, par environ 1200 hommes appuyés par deux canons de 4 et d’un obusier. Les tirs sur la façade Ouest ont été effectués à environ 100 mètres c’est ce qui explique les dégâts importants, plusieurs impacts sont incontestables, entre la fenêtre du couloir au deuxième étage (un trou symbolique a été laissé) et très probablement sous les fenêtres du 1er et 2eme étage. Les Corses ne pouvaient pas riposter efficacement, les deux petits canons qu’ils possédaient défendaient l’entrée, qui était à ce moment-là coté Est de la maison.

Après avoir bombardé aux canons la façade Ouest, l’assaut sera donné dans la soirée, il y aura au moins 20 morts parmi les Corses et 17 tués et 32 blessés du côté Français Régiment d’Eptingue (voir le livre de Damien Bregnard, Jacques Denis et Philippe Riat « Des jurassiens à la conquête de la Corse page 120). Dans une lettre datée du 5 Aout à son fils M de CONSTANT écrit  « j’ai perdu 35 hommes et un officier» pour le Royal Roussillon soit donc semble-il un total de 52 morts du côté Français.

Une centaine de Corses réussirent à s’enfuir vers Farinole, et environ 80 furent fait prisonniers. La maison sera livrée au pillage et incendiée (voir le mémorial du régiment d’Eptingue, et lettre d’un soldat aillant participé aux opérations). Les objets de valeurs ont été pillés par les soldats Français et les deux petits canons ont été pris par le Marquis De VILLENEUVE TRANS qui commandait le Royal Roussillon (ils sont toujours actuellement à la Mairie de Trans à environ 5 Km de Draguignan sur la N 557 entre Le Muy et Draguignan).

Les prisonniers Corses seront envoyés au bagne de Toulon, certains seront libérés en 1769 par échange de prisonniers avec PAOLI, BARBAGGI et Luiggi CALVELLI feront partie des libérés, la plupart des autres mourront au bagne de TOULON.

La maison et une partie terres ne seront restituées à la famille CALVELLI qu’en 1811.

Eugène Ficaja

(N°1)Luiggi Calvelli était un personnage très remuant.; Il sera nommé commandant des troupes paolistes dans le Nebbiu lors de la réunion de Venzolasca, le 13 décembre 1755. A cette occasion, il aurait fait connaître à Paoli ses dispositions particulières selon un récit anonyme parvenu aux autorités génoises  : E stato dichiarato comandante del Nebbio Luiggi Calvelli, il quale in presenza del De Paoli si pose il zaino al collo, promettendo di far cose non mai vedute… Son idée était de passer dans le Cap Corse avec l’escadron volant, ce qu’il fit peu après, en se rendant à Nonza (cf. Archvio di Stato de Gênes, Archivio Segreto, liasse 2079, 4 janvier 1756, lettre du capitaine Gandini au Sérénissime Sénat, la squadra volante osia altri paesani commandati dal rebello Calvelli che si siano ritirati, questo è certo che il detto Calvelli si è ritirato ma vi è ancora in Nonzia (sic) qualche parte…. A Nonza, il avait fait prisonnier Giovan Andrea Alessandrini, lieutenant de Canari pour Marzia Imperiale, seigneur du lieu. Gandini avait débarqué à Macinaggio le 2 avec un détachement de troupes et avait reçu des instructions de Grimaldi pour déloger Calvelli du Cap Corse (Ibid. lettres des 2 et 7 janvier 1756). On possède en outre de sa main et de celle de Giuseppe Diviziani une Grida du 2 janvier exigeant des Cap Corsins qu’ils cessent d’aider les Génois (avvisare tutti cotesti popoli di non dar alcun soccorso à i medemi, ne passo alcuno sotto alcun titolo, colore o pretesto…) et une lettre explicative le concernant par Giuseppe Maria Doria (Ibid. 3 janvier 1756) qui annonce sa décision de faire saisir tous ses biens.

(N°2) Régiment d’Eptingue 1200 hommes dont les deux tiers venaient de l’ancien Evêché de Bale mercenaires au service du Roi de France Louis XV

Royal-de-Roussillon commandé par le Marquis de Villeneuve Trans (Louis Henri) depuis le 5 Juin 1763 jusqu’au 11 Juin 1774

(N°3) C’est PAOLI qui avait nommé BARBAGGI commandant des troupes du CAP et du NEBBIO (il avait 35 ans à ce moment là), on peut se demander quelle était la valeur militaire de BARBAGGI ? Giuseppe BARBAGGI originaire de MURATO fils du capitaine Antonio BARBAGGI et de Maria Giuseppa MORATI était un homme cultivé qui avait fait partie de l’Académie CURSAY , était marié à Dionisia PAOLI fille de Clément PAOLI , donc nièce de PASQUALE DE PAOLI , il avait dirigé de 1762 à 1764 le siège de SAINT FLORENT , BARBAGGI sera fait prisonnier avec 150 hommes dans le CAP et envoyé au bagne de TOULON , il sera relâché après la conquête et s’exilera en Toscane avec son fils , ses descendants ( par sa fille ) seront les RIVAROLA d’Oletta.

Catégories : Histoire

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