Comment se sont formés les noms de famille en Corse - Les noms de famille de Patrimonio
12 février 2015 à 23:04
C’est dans la Corse de la fin du moyen âge qu’apparaissent les noms de famille. Il s’agissait d’un nom collectif, commun à une lignée : “a casata”.
Cela ne concernait alors que les seigneurs qui prenaient le nom des fiefs possédés. Leur but étant de s’unir entre membres d’une même parenté afin d’augmenter leur puissance.
Ce fût ensuite le tour d’une classe montante, les “sgiò”: des marchands, des armateurs … souvent en relation avec Gênes, qui s’agrégea à l’ancienne noblesse.
En ce qui concerne le reste de la population, c’est à dire pour la majorité, il faudra attendre la fin du XVIIIème siècle pour que se fixent définitivement les noms de famille.
Auparavant, chaque individu ne recevait à sa naissance qu’un seul nom qui lui était personnel, le prénom “u nome”.
En Corse ce prénom était très souvent composé (notons que cet usage perdure de nos jours).
La source essentielle des prénoms en Corse est chrétienne, ce sont les noms des Saints et des Martyrs. Mais on rencontre aussi beaucoup de prénoms d’origines diverses comme les prénoms auguraux, pas toujours pieux et qui pouvaient faire référence à des qualités physiques ou morales, les prénoms relatifs à des noms d’ animaux, de fleurs, des prénoms provenant de l’antiquité grecque ou latine, etc…
Les prénoms se transmettaient généralement d’une génération à l’autre. Ainsi on donnait au garçon premier né le prénom de son grand père paternel, au suivant celui de son grand père maternel. Il en était de même pour les filles avec les prénoms de leurs grand mères. Si un enfant mourait, le suivant portait le même prénom. Et cela pouvait se reproduire plusieurs fois de suite … Et tous les morts étaient ainsi “remplacés”.
Pour répondre aux interdits qu’avait érigés l’Eglise à propos des mariages consanguins, la connaissance de de la parenté sur plusieurs générations était importante.
Mais ces interdits ne pouvaient être strictement respectés puisque sans nom de famille la lignée était mal connue et les liens de parenté souvent difficiles à établir.
Déjà dans un premier temps, pour remédier à cet inconvénient, le Concile de Trente (1545-1563) imposa aux prêtres de tenir les registres consignant les baptêmes, mariages et sépultures en désignant la personne de son prénom suivi de celui de son père ainsi que du hameau et du village d’habitation. Cela devait permettre aux ecclésiastiques d’établir des “arburi di parintella” sur quatre générations.
Mais les mariages consanguins n’en furent pas pour autant supprimés puisqu’il était toujours possible de demander des dispenses à Rome et qu’elles étaient rarement, pour ne pas dire jamais, refusées!
C’est la pratique des registres paroissiaux qui sera à l’origine de l’apparition des noms de famille.
Mais il faudra du temps pour que l’usage en devienne réellement effectif. Sur le dénombrement de 1769 demandé par le Roi de France toutes les familles n’ont pas encore de patronyme.
Il est intéressant de savoir de quelle façon ces patronymes ont été formés ..
On peut dire que l’essentiel des noms de famille dérive d’un prénom. C’est le prénom d’un ancêtre qui deviendra le patronyme de la lignée. Ce prénom prenant la marque du génitif “i” qui indique l’appartenance.
Le nom de famille était généralement choisi du côté paternel mais pouvait l’être du côté maternel soit parce que la mère était d’une condition supérieure soit à cause de brouilles familiales ou pour d’autres raisons pas toujours très claires …
Il arrivait aussi parfois que le nom se modifie en cours de route, peut être (vraisemblablement ) en raison d’erreurs de transcription.
Ou bien qu’un nom nouveau apparaisse sans aucun lien avec celui des parents et qui pouvait être emprunté à une autre famille.
On le voit, cette liberté de choix complique sérieusement les choses car deux membres d’une même famille pouvaient ainsi avoir des patronymes différents. Nous aurons l’occasion de voir que ces situations se sont produites pour les familles de Patrimonio.
Plusieurs familles de PATRIMONIO tiennent leur patronyme du prénom d’un aïeul , c’est le cas pour les :
ANDREANI (d’Andriano) – AGOSTINI (d’Agostino) – BRIZI (de Brizio) – DOMINICI (de Domenico) – GIOVANNETTI (de Giovannetto) – GILORMINI & GIROLAMI (de Gilormino – Girolamo – Geronimo qui sont des variantes d’un même prénom) – GIACINTI (de Giacinto) – LEANDRI (de Leandro)- LEONARDI (de Leonardo) - NICROSI (de Nicroso) – SANTINI (de Santo) - TERIGGI (de Terice).
Certaines de ces familles ne sont plus présentes au village aujourd’hui
Le lieu d’ habitation est une autre origine fréquente des noms de famille. C’est à partir d’ un village d’origine pour un nouveau venu ou d’un hameau que se sont formés certains noms de famille.
Quelques familles de PATRIMONIO tirent leur patronyme d’un lieu :
CALVELLI (du hameau Calvello) – FICAJA (du hameau Ficaja) – OLMETA (du village d’OLMETA du CAP) - POGGI (du hameau POGGIO de FARINOLE) – POZZI (vraisemblablement d’un lieu où se trouvait un puits)- ARENA (le toponyme Arena désigne un lieu sablonneux donc le patronyme désignerait celui qui habitait un tel lieu).
On peut aussi trouver des noms de famille dont l’ origine est un surnom se rapportant à un caractère physique ou moral, à une position sociale…
Quelques familles de PATRIMONIO répondent à ces critères:
GROSSI (il devait s’agir d’un « costaud » ! ) - MORETTI (devait désigner une personne à la peau mate) - FRATACCI (provient soit d’ un surnom de dignité - de frate, moine - soit d’ un nom soulignant la parenté - de fratellu, frère).
Signalons encore un métier.
MAESTRACCI (celui qui a transmis ce nom était-il «maestro di muro » ?)
En ce qui concerne certaines catégories, on peut penser que le nom de famille s’imposait par l’usage sans qu’on en ait fait le choix.
Pour conclure, notons que la particule nobiliaire est étrangère au système patronymique corse. Le “de” employé devant certains noms correspond au “dei” italien qui signifie “qui appartient aux …”, “qui est de la famille des …” et qui devrait être éludé et s’écrire de’ comme par exemple pour Pasquale de’ Paoli.
La noblesse se signalait par le titre de “Magnifico Signore”.
A PATRIMONIO, la famille CALVELLI a porté ce titre après qu’elle ait, en remboursement d’une dette, reçu de la part d’Angelo Santo et Angelo GENTILE, seigneurs de Nonza, 14 vasseaux à OLCANI et 7 à NONZA.
Notons également que les prénoms ainsi que les noms de famille étaient transcrits sous leur forme toscane (le corse écrit n’existant pas) . Il en était de même pour les noms de lieu.
Remarquons que de nos jours, contrairement aux prénoms qui se sont “corsisés”, les noms de famille ont conservé leur forme toscane.
Chaque famille de Patrimonio a une histoire singulière et nous pourrons en reparler …
Marie-Claude
Catégories : Histoire
A partir de quand s’est installée la coutume de transmettre le prénom du grand-père aux fils ainés de chaque enfant? était-ce automatique ? en généalogie j’ai rencontré des cas qui contredisent cette règle…